La Tapisserie Saint Vincent Ferrier
Cette tapisserie a été offerte par l’évêque de Vannes Jacques Martin de Bellassise. Monseigneur Jacques Martin de Bellassise a été évêque de Vannes durant la période de 1600 à 1622. Par ce don, il souhaitait, principalement, raviver le culte à Saint Vincent Ferrier en faisant connaître sa vie et ses miracles. Accessoirement, il souhaitait embellir la cathédrale de Vannes. Il est vrai que pour la cathédrale de Vannes, ayant déjà beaucoup de difficulté à financer sa construction ainsi que son entretien, l’achat de tapisseries et de tissus précieux n’a jamais été une priorité.
Cette tapisserie, ou plus précisément, ces deux tapisseries ont été brodées avec de la laine en 1615. Chacune sont d’une longueur de 14 mètres et d’une largeur de 1 mètre 90 et posséde 7 tableaux.
De même que l’entretien de la cathédrale laissait à désirer, le travail de qualité fait par les tapissiers fut peu respecté. Ainsi, dès 1626, ces tapisseries durent être fortement raccommodées.
Ces tapisseries furent exposées dans la chapelle de Saint Vincent Ferrier jusqu’en 1860. Puis, en raison de leur très mauvais état, elles furent confiées au Musée d’Archéologie qui se situait dans la Tour du Connétable. Malheureusement, cette tour était tellement humide qu’en 1880, ces tapisseries ont été retirées de la collection.
Pour le 600 ième anniversaire de la mort de Saint Vincent Ferrier, ces tapisseries ont été restaurées et réinstallées en 2018 dans la cathédrale de Vannes.
Comme, l’avait voulu son donateur, elles participent, à nouveau, à faire connaître la vie de Saint Vincent Ferrier et décorer la chapelle où sont réunies les reliques de Saint Vincent Ferrier.
La première tapisserie de la vie de Saint Vincent Ferrier
La première tapisserie a pour objectif de raconter la vie de Saint Vincent Ferrier avant sa venue à Vannes et jusqu’à son décès à Vannes.
Le premier tableau porte la légende suivante :
HONORÉ 3e APPROVVANT L'ORDRE DES IAGOBINS LEVR
DONNE SA BÉNÉDICTION, L'AN DE GRACE 1216.
Honoré III approuvant l’ordre des Jacobins leur donne sa bénédiction, l’an grâce 1216
Dans ce tableau nous pouvons voir le Pape Honoré III couronné de la tiare et revêtu d’une chape, debout sur son trône. Il tient à sa main gauche une croix à trois branches. De sa main droite, il bénit trois frères dominicains qui sont agenouillés. Autour du Pape se trouve des cardinaux et des évêques.
Le Pape Honoré III fut le 177e pape de l’Église catholique de 1216 à 1227. Ce Pape lança la cinquième croisade qui avait été décidée par son prédécesseur lors du concile de Latran. De plus, il a soutenu la croisade contre les Albigeois.
L’ordre des Jacobins est l’ancienne appellation de l’ordre des Dominicains. Il s’agit là d’un ordre de frères prêcheurs qui est apparu à Toulouse en 1215, sous l’impulsion d’un espagnol, le Frère Dominique Nunez de Guzman. Cet ordre religieux appartient, comme les Frères Franciscains ou Frère mineurs à la catégorie des frères mendiants.
Contrairement à l’ordre des Cisterciens, l’ordre des Dominicains, comme celui des Franciscains, vit au milieu de la population. Ils vivent donc dans des couvents et non pas des monastères. Ce ne sont pas de moines, ce sont des religieux.
Les Dominicains font le vœu d’obéissance, de pauvreté et de chasteté. Ils se conforment ainsi à la vie menée par le Christ.
La mission principale de l’ordre des Dominicains est de lutter contre les hérésies et à proclamer et à expliquer la Vie et les Paroles du Christ.
Le second tableau porte la légende suivante :
SAINT VINCENT, MANDÉ PAR LE DVC IEHAN Ve POVR LA.
SAINCTETÉ DE SA VIE, LE VIENT TROVVER EN BRETAGNE.
Saint Vincent, mandé par le Duc Jean V pour la sainteté de sa vie, vient le trouver en Bretagne
Le Duc Jean V dit Jean le Sage, autrement dit, en langage d’aujourd’hui Jean le Savant est né le 24 décembre 1389 au château de l’Hermine à Vannes. Il est le troisième enfant, mais le premier garçon, du Duc Jean IV de Bretagne et de son épouse Jeanne de France. Il devint Duc de Bretagne à l’âge de dix ans, le 23 mars 1401.
Le Duc Jean V de Bretagne a reconnu très rapidement Benoit XIII comme Pape. A cette époque, plusieurs Papes existaient en même temps. Il en eut même trois : Le Pape de Pise, le Pape d’Avignon et le Pape de Rome. Le Pape Benoit XIII était un Pape d’Avignon qui était un ancien cardinal aragonais. Saint Vincent Ferrier avait été le directeur de conscience de ce Pape.
Dans ce tableau nous pouvons voir le Duc Jean V assis sur son trône. Il est entouré de sa cour et d’hommes en armes. Tout ce monde est habillé à la mode, non pas celle qui existait à l’époque de Saint Vincent Ferrier, mais à celle qui existait lors du tissage de la tapisserie.
Devant le Duc Jean se trouve un messager qui est , soit en train de prendre la missive que lui a tendu le Duc, soit est en train de la lui donner.
Sur la gauche, dans le lointain, nous pouvons voir Saint Vincent Ferrier qui se dirige vers la Bretagne.
Le troisième tableau porte la légende suivante :
LE SAINT VENANT A VENNES EN 1417, L'EVESQUE AVEC
SON CLERGÉ VA AV DEVANT DE LVY EN PROCESSION GÉNÉRALE.
Le Saint venant à Vannes en 1417, l’évêque avec son clergé va au devant de lui en procession générale.
La date de 1417 s’explique par une différence de calcul des années avec celui qui a cours aujourd'hui. Ainsi, selon, le méthode de calcul actuel, cette procession a eu lieu le 5 mars 1418.
Dans ce tableau, nous pouvons voir une procession dont la tête est en train d’arriver à une porte de la ville de Vanne. En tête de cette procession se trouve les chanoines de la cathédrale de Vannes qui sont revêtus de leur chapes. Puis, vient Amaury de la Motte, évêque de Vannes, avec sa crosse et sa mitre et revêtu d’un chape. Puis, nous reconnaissons Saint Vincent Ferrier en habit de dominicain, robe blanche et cape noire. Derrière se trouve le Duc Jean V et suivi de sa cour. Enfin vient le peuple de Vannes.
Le quatrième tableau porte la légende suivante :
PRESCHANT, DEVX HOMMES MVRMVRENT, SONT
PVNIS ET SOVBDAIN GVÉRIS A LA PRIÈRE DV SAINT.
Prêchant, deux hommes murmurent, sont punis et soudains guéris à la prière de sainteté
Sur le côté gauche, nous pouvons voir deux hommes qui gesticulent et murmurent contre Saint Vincent Ferrier. Cette situation est, sûrement, antérieure à l’arrivée de Saint Vincent Ferrier en Bretagne.
Sur la droite se trouve Saint Vincent Ferrier en train de prêcher dans une chaire. A côté de lui se trouve un autre dominicain. En effet, Saint Vincent Ferrier n’était pas venu seul en Bretagne. D’autres dominicains l’assistaient dans l’organisation des missions d’évangilisation.
Devant Saint Vincent Ferrier se trouve les hommes et les femmes qui sont entrain de l’écouter attentivement.
Le miracle consiste donc à la conversion des coeurs d’hommes et de femmes qui ne souhaitaient pas recevoir Saint Vincent Ferrier mais qui, lors de sa venue se sont convertis.
Le cinquième tableau porte la légende suivante :
LE ROY D'ARAGON ENTRANT EN SA CHAMBRE ET LE VOIANT ENVIRONNÉ
D'VNE GRANDE LVMIÉRE R.
Le Roi d’Aragon entrant en sa chambre et le voyant environné d’une grande lumière
Ce panneau a beaucoup souffert de l’humidité.
Il raconte une scène bien antérieure à l’arrivée de Saint Vincent Ferrier en Bretagne. En effet, avant que Saint Vincent soit Directeur de conscience du Pape Benoit XIII, il était le Conseiller du Roi d’Aragon et le confesseur de la Reine.
Au premier plan, nous pouvons voir le Roi d’Aragon devant lequel s’incline un courtisan. Les habits du Roi et ceux du courtisan sont, là encore, ceux du 16 ième siècle.
Au second plan, sur la gauche se trouve Saint Vincent Ferrier agenouillé devant un crucifix et tout environné de lumière.
Le sixième tableau porte la légende suivante :
VNE PARALITIQVE TOVCHÉE PAR LE SAINT EST GVÉRIE
MIRACVLEVSEMENT, LVI DISANT : ITE IN NOMINE IESV.
Une paralytique touchée par le Saint est guérie miraculeusement, lui disant : Ite in nomine Iesu
Il n’est pas possible de situer la date de ce miracle.
Nous pouvons voir, en arrière plan sur la gauche, deux hommes qui aident une femme paralysée à se mouvoir.
Nous retrouvons, cette même femme accompagnée de ses deux aides, devant Saint Vincent Ferrier. Saint Vincent Ferrier la touche en lui disant, ce qui est écrit dans la cartouche au dessus de sa tête : Ite in nomine Iesu (Au nom de Jésus).
Dans cette scène, Saint Vincent Ferrier est accompagné d’un frère dominicain et de plusieurs courtisans.
Le septième tableau porte la légende suivante :
IL REND L'AME A VENNES, 1418, AGÉ DE 70 ANS, ET ENTERRÉ
EN L'ÉGLISE CATHÉDRALE PRÉS LE GRAND AVTEL.
Il rend l’ame à Vannes en 1418, agé de 70 ans, et enterré en l’église cathédrale près du grand autel
Lors de son retour à Vannes, Saint Vincent Ferrier était usé par l’âge, les privations et la fatigue résultant de ses voyages à travers l’Europe. Il meurt à Vannes selon la nouvelle méthode de calcul des dates, le 5 avril 1419, dans la maison de la veuve Dreulin. La Duchesse de Bretagne constatant que frère Vincent avait besoin de soin, avait beaucoup insisté auprès du futur saint qu’il renonce, momentanément, à ses privations. Elle finit par obtenir qu’il déménagea dans la maison de la veuve Catherine Dreulin, de son nom de jeune fille Le Brun, pour se faire soigner.
Nous pouvons voir Saint Vincent Ferrier allongé sur son lit de mort, entouré des frères dominicains, les uns debout, les autres à genoux.
Dans un second plan, nous pouvons voir les dominicains portant le corps du frère Vincent à la cathédrale de Vannes.
Ce dernier détail est, totalement, erroné. En effet, les frères dominicains qui accompagnaient Saint Vincent Ferrier souhaitaient ramener le corps de Saint Vincent Ferrier à Valence en Espagne. Mais, l’évêque de Vannes et le Duc de Bretagne s’opposèrent à cette demande. En effet, Saint Vincent Ferrier leur avait laissé le choix de choisir eux-mêmes son lieu de sépulture. Suite à une bousculade assez violente, le corps de Saint Vincent Ferrier fut porté dans la cathédrale de Vannes par le clergé de la cathédrale de Vannes.
Par la suite, de nombreuses fois, les dominicains espagnols cherchèrent à récupérer le corps de Saint Vincent Ferrier.
La deuxième tapisserie sur la vie de Saint Vincent Ferrier
La deuxième tapisserie a pour objet de montrer les miracles attribués à Saint Vincent Ferrier suite à son décès.
Tout comme la première tapisserie, elle est composée de 7 tableaux.
Le premier tableau porte la légende suivante :
VN FRÉNÉTIQVE AMENÉ A LA TVMBE
DV SAINCT FEVT SOVLAIN GVÉRY.
Un frénétique amené à la tombe du saint fut soudain guéri
Ce premier tableau décrit la guérison miraculeuse d’Hervé Perrin en 1425 qui était devenu soudainement fou furieux. Son épouse et ses voisins avait prié Saint Vincent Ferrier d’obtenir sa guérison.
Nous pouvons voir deux hommes poussant un possédé vers le tombeau de Saint Vincent Ferrier. Ce tombeau est composé d’un gisant censé représenter Saint Vincent Ferrier. Cette représentation est fantaisiste.
Nous pouvons voir une femme implorant Saint Vincent Ferrier d’obtenir de Dieu la guérison du possédé en souvenir de ses mérites.
A gauche, en arrière, nous pouvons voir l’autel principal avec le Saint-Sacrement et des cierges.
Le deuxième tableau porte la légende suivante :
VN ENFANT TOMBÉ D'VN ARBRE ET TENV POVR
MORT EST REMIS EN SANTÉ VOVÉ AV SAINCT.
Un enfant tombé d’un arbre et tenu pour mort est remis en santé voué au saint
Ce deuxième tableau décrit l’accident de Jean Goéhahan qui tomba d’un noyer en 1452. Cet enfant était le neveu de Yves de Manheis, abbé de Lanvaux.
Nous pouvons voir un enfant couché par terre, sans mouvement, au pied d’un arbre. A gauche se trouve quatre religieux vêtus d'une robe blanche et d’un manteau noir : il s’agit de frères dominicains. Un des religieux est à genoux en train de prier Saint Vincent Ferrier pour obtenir la guérison de l’enfant.
A droite et au milieu nous pouvons voir les témoins de l’accident.
Le troisième tableau porte la légende suivante :
VN AVLTRE AFFLIGÉ DV HAVT MAL EST
GVÉRY PVBLICQVEMENT VOVÉ AV SAINCT.
Un autre affligé du haut mal est guéri publiquement voué au saint
Ce troisième tableau décrit la guérison miraculeuse de Jean Maydo en 1420 de ses crises d’épilepsie.
Nous pouvons voir un épileptique tenu par deux hommes près du tombeau de Saint Vincent Ferrier. Comme précédemment, la représentation du tombeau de Saint Vincent Ferrier est fantaisiste.
Nous retrouvons l’autel principal avec le Saint-Sacrement et des cierges.
Le quatrième tableau porte la légende suivante :
VN ENFANT FRAPÉ DE LA PESTE, RECOMMANDÉ
PAR SES PARENS AV SAINCT, EST GVÉRY.
Un enfant frappé de la peste , recommandé par ses parents au saint, est guéri.
Durant la peste qui frappa la région durant les années 1452 à 1453, de nombreuses guérisons de cette maladie furent attribuées à Saint Vincent Ferrier.
Le tableau représente un enfant couché à même le sol. A ses côtés se trouve une femme en train de prier Saint Vincent Ferrier.
A droite, nous pouvons voir un gentilhomme et une femme en habit du 16 ième siècle.
En arrière plan à gauche, nous pouvons voir les remparts et une porte de la ville de Vannes.
Le cinquième tableau porte la légende suivante :
VN AVLTRE TOMBÉ DANS VNE RIVIÈRE, AGÉ DE CINCQ
ANS, EST RENDV A TERRE PAR LES PRIÈRES DV SAINCT.
Un autre tombé dans une rivière, âgé de cinq ans, est rendu à terre par les prières du saint
Ce tableau représente la guérison d’un enfant de Josselin, Jean Guého, qui fut retiré de la rivière de l’Oust en 1452.
A l’arrière plan du tableau, au milieu du paysage, sur le bord de la rivière, nous pouvons voir plusieurs hommes avec des pantalons très larges. Avec eux se trouve une femme à genoux.
Un peu plus en avant, nous pouvons voir la même femme tendant des bras pour retirer un enfant de l’eau.
Sur la gauche, nous pouvons voir la même femme rentrée avec son enfant sauvé des eaux.
Le sixième tableau porte la légende suivante :
LE SAINT, APRÈS GRAND NOMBRE DE MIRACLES EST CANONISÉ PAR
CALIXTE 3e, 1455, DV VIVANT DE PIERRE 2, DVC DE BRETAIGNE.
Le saint, après grand nombre de miracles est canonisé par Calixte III, 1455, du vivant du Pierre II, Duc de Bretagne
Le Pape Calixte III est né à Valence en 1378. Son nom de famille est Alonso de Borja i Llançol. Selon l’histoire de Saint Vincent Ferrier, celui-ci l’aurait rencontré enfant et aurait prédit sa nomination en tant que pape. Alonso de Borja i Llançol, alors évêque Valence, accompagna Alphonse V d’Aragon lors de sa conquête de Naples en 1442.
Lorsqu’il fut élu pape Calixte III avait 76 ans. C’est cet âge qui permit son élection. En effet, les familles Orsini et Colonna empêchaient le conclave d’élire un pape. Ces deux familles n’étaient jamais d’accord sur les noms proposés. Le conclave finit par proposer Calixte III en raison de son âge et de sa neutralité quant aux disputes italiennes.
Ce tableau décrit la canonisation de Saint Vincent Ferrier le 29 juin 1455 à Rome dans la cathédrale Saint Pierre du Vatican. L’annonce de cette canonisation fut confirmée au Duc de Bretagne par la bulle du 14 juillet 1455.
Nous pouvons voir le Pape sur son trône, entouré d’évêques et de prêtres. Sur les marches du trône, un diacre, deux ecclésiastiques en chape et un moine prient le Pape d’accorder la canonisation de Saint Vincent Ferrier.
Le septième tableau porte la légende suivante :
CESTE TAPISSe DONNÉE PAR RÉVÉREND PERE EN DIEV MESSIRE IACQVES DE
MARTIN EVESQVE DE VENNES, CONSEILr AV CONSEIL D'ESTAT, L'AN 1615.
Cette tapisserie donnée par révérend père en Dieu messire Jacques de Martin évêque de Vannes, conseiller au Conseil d’État, l’an 1615
Nous pouvons voir dans ce tableau, Jacques Martin de Bellassise, évêque de Vannes et donateur de ces tapisseries. Il est représenté agenouillé sur un prie-dieu et revêtu d’un rochet (surplis à manche étroite) et d’une mozette (pèlerine violette boutonnée sur le devant). Afin d’être plus précis dans les traits, le visage de l’évêque est brodé en soie alors que les tapisseries sont brodées en laine.
Sur le prie-dieu, nous pouvons reconnaître l’écusson de l’évêque : « D’or au château maçonné de sable ». Nous pouvons voir aussi une mitre et une crosse.
Devant l’évêque de Vannes se trouve un autel où nous pouvons voir Saint Vincent Ferrier entre les apôtres Saint Pierre et Saint Paul.